Une évolution notable dans la structure du pouvoir sanitaire français s’est concrétisée par la publication des décrets n° 2025-723 et n° 2025-724. Ces textes traduisent une volonté politique claire de réaffirmer l’autorité de l’État déconcentré dans le pilotage des politiques de santé. Jusqu’alors, les Agences Régionales de Santé agissaient avec une large autonomie dans la planification et la régulation de l’offre de soins. Désormais, elles devront composer avec l’avis contraignant des préfets.
Un co-pilotage stratégique imposé
La principale transformation réside dans l’association obligatoire du préfet de région à toute élaboration ou modification du schéma régional de santé. Si l’ARS était auparavant maîtresse des grandes orientations, elle doit maintenant soumettre ses projets à la validation de l’autorité préfectorale. Ce changement fait du préfet un co-acteur stratégique, garantissant qu’une perspective politique et territoriale vienne compléter l’approche technique de l’agence. Les choix majeurs concernant l’organisation des soins ne pourront plus ignorer les réalités et les enjeux locaux.
Un droit de regard sur les décisions sensibles
Le pouvoir des préfets s’étend également aux décisions les plus lourdes de conséquences pour les établissements. La réforme instaure une double garantie de consultation pour toute mesure de sanction ou de régulation.
- Retrait d’autorisation : Pour retirer une autorisation d’activité à un établissement sanitaire ou médico-social, l’ARS doit désormais recueillir l’avis du préfet de région et du préfet de département. Cette double consultation vise à s’assurer que l’impact territorial, social et économique d’une telle décision est pleinement mesuré.
- Suspension d’activité : De même, toute suspension d’activité, même en urgence, ne peut être prononcée sans l’avis préalable du préfet de département. Cette mesure renforce la transparence et la légitimité de décisions souvent prises dans des contextes de crise.
Des conséquences multiples sur le terrain
Ce rééquilibrage des pouvoirs n’est pas sans conséquences pour les différents acteurs du système de santé. L’immixtion du préfet dans le processus décisionnel introduit une nouvelle dynamique dont les effets se feront sentir à tous les niveaux.
- Pour les établissements de santé et médico-sociaux, les décisions de l’ARS seront soumises à des arbitrages croisés. Si cela peut potentiellement allonger certains délais, cela pourrait aussi garantir une meilleure prise en compte des réalités locales dans les arbitrages finaux.
- Pour les collectivités territoriales, cette réforme signifie une interaction accrue avec les préfets sur les dossiers de santé publique, ouvrant un nouveau canal de dialogue et d’influence.
- Pour les usagers, cette évolution porte la promesse d’une régulation plus ancrée dans les territoires et, par conséquent, plus attentive à leurs préoccupations concrètes.
Ce renforcement des prérogatives préfectorales marque la fin d’une gouvernance sanitaire et médico-sociale ancrée autour des ARS. L’État réaffirme sa volonté de piloter politiquement ces secteurs, en intégrant pleinement les dimensions territoriales aux décisions qui façonnent notre système de santé.