Plombée par un déficit historique et une explosion des dépenses, l’Assurance Maladie se trouve à la croisée des chemins. Entre mesures d’urgence et réformes structurelles, comment préserver l’accès aux soins tout en redressant les comptes ?
1.Un déficit record : l’alerte rouge est donnée
Avec 16 milliards d’euros de déficit en 2025 et un trou de 22,1 Md€ sur l’ensemble de la Sécurité sociale, la situation budgétaire atteint un niveau sans précédent. L’ONDAM, fixé à 265,9 Md€, fait l’objet d’une alerte pour un dépassement d’au moins 1,3 Md€ cette année.
- D’où vient l’« hémorragie » ?
- Pression démographique et sanitaire : vieillissement de la population et maladies chroniques pèsent sur les indemnités journalières et les ALD, dont le nombre pourrait bondir à 18 millions d’ici 2035.
- Effet Ségur non financé : les revalorisations salariales du secteur hospitalier (13 Md€) restent à la charge de l’Assurance Maladie.
- Recettes à la traîne : croissance de 2,7% seulement des recettes en 2024, contre 3,7% de dépenses.
- Le plan « corps à corps » pour économiser
Face à l’urgence, la CNAM propose 60 mesures destinées à dégager 22,5 Md€ d’économies d’ici 2030, dont 3,9 Md€ dès 2026.
- Prévention massive : réduire l’incidence des ALD par la promotion de la santé et du dépistage.
- Parcours coordonnés : fluidifier le parcours entre ville et hôpital pour éviter les hospitalisations inappropriées.
- Régulation du médicament : baisse tarifaire pluriannuelle, recours renforcé aux génériques et biosimilaires.
- Lutte anti-fraude : intensification des contrôles, avec un potentiel d’économies de 4,5 Md€.
- Mesures d’urgence : couper dans le vif
Pour contenir le dépassement ONDAM 2025, Bercy a activé 1,7 Md€ de mesures correctives :
- 500 M€ sur le médicament via reports de baisses de prix et rabais renforcés.
- Gels tarifaires jusqu’au 1er janvier 2026 sur certaines consultations.
- Contrôles accrus des indemnités journalières.
- Les défis de la mise en œuvre
La réussite de ce plan titanesque bute sur deux obstacles majeurs :
- Résistance des professionnels de santé aux baisses tarifaires et aux nouvelles régulations.
- Complexité administrative : intégrer des réformes profondes tout en assurant la continuité des soins.
- Perspectives : vers un nouveau « contrat social »
Au-delà de l’urgence, la CNAM plaide pour une redéfinition du pacte de financement, articulant davantage solidarité et responsabilisation individuelle. Modernisation des outils de pilotage, dialogue renforcé entre Assurance Maladie, complémentaires et patients : la bataille pour la soutenabilité du modèle français ne fait que commencer.