DOSSIER DE L’INFO MILITANTE FO 28 JANVIER 2022

Sous l’effet conjugué du travail à domicile imposé par la crise sanitaire et de la signature en novembre 2020 d’un accord national interprofessionnel (ANI) cadrant le télétravail, la négociation sur cette nouvelle organisation du travail progresse lentement en entreprise. Sur les dix premiers mois de 2021, 2 720 accords ont été conclus sur ce thème, soit une augmentation de 27 % en un an, selon le ministère du Travail. Mais une récente étude de l’ANACT démontre que les employeurs restent encore globalement prudents, voire réticents, à l’idée de développer le télétravail plus de deux jours par semaine. Dans ces accords 2020, l’éligibilité au télétravail se fait en majorité sur la base des métiers et non des activités « télétravaillables ». Et la mise en place du télétravail y est assortie de modalités contraignantes de contrôle du temps de travail et de pause. L’expérience du télétravail en temps de crise n’a pas levé les craintes des entreprises de perdre en productivité et en contrôle.

Durant la première semaine de ce mois de janvier, 29 % des salariés étaient au moins partiellement en télétravail et 60 % des salariés pouvant facilement télétravailler l’ont fait, selon un sondage Harris Interactive réalisé pour le ministère du Travail. Quant au nombre de jours télétravaillés, il était de 3,3 jours par semaine. Ce sont peu ou prou les mêmes statistiques qu’en décembre dernier, malgré l’injonction du gouvernement de renforcer le télétravail après les fêtes pour lutter contre le variant Omicron du Covid-19.

Ces dernières années, si la part des télétravailleurs parmi les salariés est restée globalement stable hors les périodes de confinement, le nombre de jours télétravaillés a plus que doublé. Ainsi, selon une enquête CSA pour Malakoff Humanis réalisée en février 2021, près d’un salarié sur trois (31 %) était en télétravail à temps complet ou partiel fin 2020, en moyenne 3,6 jours par semaine. Avant la crise sanitaire, en novembre 2019, 30% des salariés étaient déjà télétravailleurs, mais sur un nombre de jours réduit à 1,6 par semaine.

Le salarié doit être volontaire

Il est indéniable que la crise sanitaire liée au Covid-19 a donné un coup d’accélérateur au télétravail, après que la plupart des salariés se sont vu imposer le travail à domicile lors du premier confinement au printemps 2020. Cette situation exceptionnelle a permis de lancer enfin, en novembre 2020, la négociation d’un accord national interprofessionnel (ANI) sur le télétravail, revendication portée depuis plusieurs années par FO. L’objectif de la confédération était que soit clarifié le cadre législatif du télétravail, que les salariés soient protégés et leurs droits confortés.

Après avoir traîné des pieds pour ouvrir cette négociation, le patronat avait fait volte-face et avait imposé un calendrier très resserré en raison du contexte sanitaire. Un ANI pour une mise en œuvre réussie du télétravail a été conclu le 26 novembre 2020 après une négociation express de trois semaines. Il a été signé par l’ensemble des organisations syndicales et patronales à l’exception de la CGT.

Sur le fond, ce texte clarifie le cadre du télétravail, qu’il soit classique ou lié à une situation exceptionnelle (dont pandémie), en complétant l’ANI de 2005. Parmi les avancées revendiquées par FO, l’ANI acte que le télétravail dit classique ne peut pas être imposé et doit reposer sur le volontariat du salarié. Un refus ne peut pas être un motif de rupture du contrat de travail. Le texte garantit aussi la réversibilité, permettant au salarié qui le souhaite de revenir travailler dans les locaux de l’entreprise.

Autre point important, la fréquence du télétravail doit être décidée entre l’employeur et le salarié, cela notamment pour préserver un lien social. Il rappelle également le droit à la déconnexion et précise que les frais professionnels sont à la charge de l’employeur.

Dans la fonction publique, pour les trois versants, un accord-cadre relatif à la mise en œuvre du télétravail a été signé par tous les syndicats en juillet 2021. Lui aussi acte notamment le nécessaire volontariat de l’agent.

Moins de 3 % des accords et avenants signés en 2020 mentionnent le télétravail

Les entreprises et les branches sont encouragées à négocier sur le télétravail, même si cela n’a rien d’obligatoire. À défaut d’accord collectif, les dispositions contenues dans l’ANI s’appliquent, ce dernier ayant été étendu en avril 2021. Le dialogue social progresse doucement. Selon le ministère du Travail, 2 720 accords ont été signés en 2021, contre 1980 en 2020.  À la suite du premier confinement lié au Covid, de nombreuses entreprises ont négocié leur premier accord de télétravail ou renégocié l’accord existant, constate l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact) dans une étude publiée en novembre et portant sur les accords signés en 2020. Elle précise toutefois que la tendance était déjà à la hausse depuis 2018 (+ 30% annuels). Au total, les textes mentionnant le télétravail représentent cependant moins de 3 % des accords et avenants signés cette année-là.

Sur le profil des entreprises, les accords concernent d’abord, en proportion, celles de 50 à 250 salariés (40 %). Viennent ensuite celles de moins de 50 salariés ou de 250 à 1 000 salariés (25 % chacune), puis les plus de 1 000 salariés (10 %).

En termes de secteurs d’activité, les accords concernent d’abord l’industrie manufacturière et les activités spécialisées scientifiques et techniques (16 %), puis les activités financières et d’assurance (11 %) et l’automobile (11 %).

Les auteurs de l’étude ont analysé une quarantaine d’accords. Pour beaucoup de négociateurs, le cœur du sujet porte sur les différents types de télétravail (occasionnel, régulier, exceptionnel, flexible), les formules privilégiées (c’est-à-dire le nombre de jours autorisés) ainsi que sur l’articulation entre télétravail et temps partiel ou déplacements, constatent-ils. Ils identifient quatre profils d’employeurs : les réticents, les prudents, les convaincus et les expérimentateurs. Et globalement, les accords de type « réticents » ou « prudents » restent majoritaires en 2020 puisqu’un tiers des accords se limitent à un jour de télétravail maximum par semaine et la moitié à deux jours.