Dans les open spaces comme dans les ateliers, le constat s’impose : promouvoir un bon technicien ne suffit pas à faire un bon manager. Cette évidence, longtemps ignorée par les organisations, trouve aujourd’hui un écho dans une nouvelle génération d’ouvrages professionnels qui assument une posture inédite : reconnaître que l’art de manager s’apprend, et que le droit à l’erreur existe. Le SAV des managers, coécrit par Fabienne Broucaret, rédactrice en chef de Courrier Cadres, et Aurélie Durand, coach psychologue, incarne parfaitement ce tournant.​

Trente cas, trente défis du quotidien

Résistance à un nouvel outil numérique, communication défaillante, conflits larvés : l’ouvrage décortique méthodiquement trente situations concrètes auxquelles sont confrontés les encadrants, du premier niveau hiérarchique aux cadres expérimentés. Chaque cas fait l’objet d’une analyse experte qui cherche moins à imposer une recette miracle qu’à décrypter les ressorts psychologiques – attentes non formulées, peurs légitimes, besoins d’accompagnement – qui sous-tendent les blocages apparents.​

Cette approche fait écho à une demande pressante du terrain : face à l’accélération des transformations organisationnelles et numériques, les managers se sentent souvent isolés, sommés de réussir sans disposer des clés de compréhension nécessaires.​

Une pédagogie de la bienveillance

L’originalité du guide réside dans son parti pris assumé : déculpabiliser plutôt que prescrire. Là où d’autres manuels promettent performance et excellence, ce SAV managérial reconnaît la complexité du réel et propose une posture réflexive. Il s’inscrit ainsi dans une évolution plus large des pratiques d’encadrement, où bienveillance et écoute ne sont plus perçues comme des faiblesses mais comme des leviers d’efficacité durable.​

Cette philosophie tranche avec les approches plus normatives incarnées par des classiques comme Le Manager Minute de Kenneth Blanchard, centré sur la simplicité opérationnelle, ou les publications thématiques de Harvard Business Review, davantage tournées vers l’innovation stratégique.​

L’expert plutôt que le gourou

 En convoquant des experts variés pour chacune des trente situations, les auteures adoptent une posture humble : pas de vérité managériale unique, mais des regards croisés qui permettent à chaque lecteur de construire sa propre boîte à outils. Cette multiplicité des voix contraste avec une littérature managériale souvent prescriptive, voire dogmatique.​

Former les managers, un enjeu d’avenir

Au-delà de cet ouvrage, c’est toute une réflexion sur la professionnalisation du management qui s’impose dans les organisations. Alors que les entreprises investissent massivement dans la formation technique de leurs équipes, l’accompagnement des managers reste souvent le parent pauvre des budgets formation.​

Pourtant, les chiffres parlent d’eux-mêmes : un management défaillant figure parmi les premières causes de démission et de désengagement professionnel. Dans ce contexte, des guides comme Le SAV des managers, mais aussi le Guide du manager débutant des éditions Eyrolles ou les ouvrages spécialisés du catalogue des business schools, ne constituent pas un luxe mais un investissement stratégique.​

Entre théorie et pratique

La force de ces nouveaux guides réside dans leur capacité à articuler analyse psychologique et pragmatisme opérationnel. Ils répondent à une génération de cadres qui refuse les postures autoritaires héritées du passé, mais qui ne veut pas non plus verser dans un accompagnement sans exigence. L’équilibre est délicat : manager, c’est à la fois fixer un cap et accompagner les équipes, exiger des résultats et reconnaître les difficultés.​

Se former, un acte de responsabilité

Lire sur le management n’est plus un aveu de faiblesse mais un acte de lucidité professionnelle. Dans un monde du travail en mutation accélérée, où les modes d’organisation se réinventent constamment, le manager qui refuse de se former prend le risque d’une obsolescence rapide de ses pratiques. À l’inverse, celui qui s’appuie sur des ressources documentées, qui confronte son expérience à celle d’autres praticiens, qui accepte de questionner ses certitudes, se donne les moyens d’une adaptation continue.​ C’est précisément ce chemin que proposent ces ouvrages : non pas des solutions toutes faites, mais une invitation au questionnement permanent. Car au fond, le bon manager n’est pas celui qui sait tout, mais celui qui sait apprendre.​