La Cour des comptes agite le spectre d’une « crise de liquidité » frappant la sécurité sociale. Voilà une présentation alarmiste qui sert bien les intérêts de ceux qui, sous couvert de rigueur budgétaire, cherchent à légitimer une austérité toujours plus sévère. Mais à bien y regarder, ce prétendu risque financier n’est autre qu’un montage comptable révélant une impasse dans laquelle le SNFOCOS n’ira pas.
Le rapport annuel de la Cour sur la Sécu s’attarde sur le jeu organisé autour de la dette sociale. Les déficits liés au Covid ont été opportunément transférés à la Cades, reportant l’extinction de cette dernière à 2033 grâce à la CRDS. Cette dette, contrairement à celle de l’État, est soumise à un impératif d’amortissement, exigeant soit un allongement de la durée de remboursement, soit une hausse de la CRDS. Mais voilà : tout cela suppose des décisions législatives que le gouvernement refuse d’assumer.
Dans ce contexte, l’Acoss, qui n’a pas vocation à porter une dette de cette ampleur, se retrouve en première ligne. L’argument avancé par la Cour ? Une « crise de liquidité » imminente, qui pourrait éclater en 2027 faute de solutions pérennes pour financer les déficits. Plutôt que d’affronter cette réalité de manière responsable, elle prône des coupes budgétaires et la mise en œuvre d’un programme d’économies sur les dépenses de santé.
Ce dogme des économies à tout prix empêche une stratégie de financement adaptée aux besoins sanitaires du pays. La Cour des comptes préconise de restreindre la hausse des dépenses de santé en s’attaquant à l’Ondam, pourtant systématiquement dépassé depuis 2020. Mais comment expliquer cette posture, alors que les hôpitaux et établissements médico-sociaux sont en crise profonde, faute de financements adéquats ?
En réalité, le problème est ailleurs. Depuis la crise du Covid, la trajectoire budgétaire de l’assurance maladie ne peut être calquée sur la seule progression du PIB. Les investissements nécessaires à la modernisation du système de soins nécessitent une ressource stable et non un rationnement forcé de la dépense. Il faut cesser de croire que l’objectif peut être atteint par une simple réorganisation de l’offre de soins. Il faudra inévitablement revoir les modalités de financement, avec une hausse progressive et maîtrisée de la CSG, seul levier pertinent pour garantir aux Français un système de santé à la hauteur de leurs attentes.