En dénonçant l’obsolescence des dispositions relatives au télétravail, le gouvernement s’est fait l’écho du rapport conjoint élaboré par les partenaires sociaux en la matière peu avant l’été. Plusieurs mesures contenues dans le projet d’ordonnance présenté le 31 août s’inspirent des pistes proposées par ce rapport afin de favoriser les conditions d’accès et d’exercice du télétravail.
Organiser le télétravail au niveau de l’entreprise
Actuellement, le télétravail doit être prévu dans le contrat de travail ou dans un avenant. Ce ne serait plus le cas, à la lecture du projet d’ordonnance.
En effet, la mise en œuvre du télétravail nécessiterait un accord collectif ou, à défaut, une charte élaborée par l’employeur après avis du comité social et économique (CES), s’il existe. Cet accord ou cette charte définirait :
- Les conditions requises pour passer au télétravail ou pour y mettre un terme ;
- Les modalités d’acceptation des conditions de mise en œuvre du télétravail ;
- Les modalités de contrôle du temps de travail ou de régulation de la charge de travail ;
- Les plages horaires durant lesquelles l’employeur pourrait habituellement contacter le salarié en télétravail.
Pour faire face à des contraintes personnelles, prévoit également le projet d’ordonnance, tout salarié qui occupe un poste éligible à un mode d’organisation en télétravail dans les conditions prévues par un accord collectif ou, à défaut, par la charte pourrait demander à en bénéficier.
Formaliser le télétravail occasionnel
Le plus souvent, lorsqu’il n’est pas régulier, le télétravail est aujourd’hui organisé de manière informelle.
Pour mettre un terme à ce télétravail gris, le projet d’ordonnance exige que le télétravail occasionnel soit mis en œuvre d’un commun accord entre l’employeur et le salarié. Ce double accord serait recueilli par tout moyen à chaque fois qu’il est mis en œuvre. On peut imaginer qu’un simple échange de mail suffirait à formaliser ce recours au télétravail. De même, rien n’empêcherait à l’employeur de définir dans l’accord collectif ou la charte les modalités de recours à ce type de télétravail.
Selon nous, un salarié pourrait recourir au télétravail pour des raisons personnelles, mais également en cas de circonstances exceptionnelles (par exemple, en cas d’épidémie). En effet, le projet d’ordonnance n’exige plus que cette possibilité, de recourir au télétravail dans des circonstances exceptionnelles (C ;trav.,art.L.122-11), nécessite un décret d’application (qui n’a jamais été publié). Ainsi, en cas de circonstances exceptionnelles, le salarié et l’employeur pourraient décider ou non de recourir au télétravail. L’accord collectif ou la charte pourrait également organiser le recours au télétravail en de telles circonstances.
Obliger l’employeur à motiver son refus d’accorder le télétravail
Une nouveauté de taille ferait son apparition : l’employeur qui refuse d’accorder le bénéfice du télétravail à son salarié aurait l’obligation de motiver sa réponse.
En revanche, pas de changement côté salarié : le refus d’accepter un poste de télétravailleur n’est pas un motif de rupture du contrat de travail.
Protéger le télétravailleur contre les AT-MP à domicile
Le projet d’ordonnance organise un statut du télétravailleur. Ce dernier aurait les mêmes droits (notamment, droits collectifs, accès à la formation) que le salarié qui exécute son travail dans les locaux de l’entreprise.
Le texte clarifie également la prise en charge des accidents subis sur le lieu où s’exerce le télétravail. Ainsi, un tel accident survenu pendant les plages horaires du télétravail serait présumé être un accident de travail. Autrement dit, il serait pris en charge dans les mêmes conditions que s’il avait été victime de l’accident dans les locaux de l’entreprise. A charge pour l’employeur de combattre la présomption d’accident du travail, s’il estime que l’accident a été causé par une cause étrangère au travail.
Supprimer l’obligation de prise en charge des coûts
L’obligation de prendre en charge tous les coûts découlant directement de l’exercice du télétravail (coût des matériels, logiciels, abonnements, communications et outils, etc.) serait supprimée. Une telle mesure écarterait notamment l’évaluation des coûts au réel retenu jusqu’à maintenant par l’Urssaf. L’accord collectif ou la charte serait dès lors libre d’organiser
Article Liaisons Sociales Quotidien du 7 septembre 2017