ARTICLE FO CADRES DU 17 MARS 2021 

Depuis un an déjà, de nombreux salariés sont en télétravail. Un contentieux est survenu suscitant l’inquiétude des syndicats et la remise en cause du principe d’égalité de traitement entre les salariés.

Lorsque les salariés sont en télétravail ont-ils le droit aux titres restaurants ? FO-Cadres dit oui et d’une manière générale toutes les positions convergent dans ce sens : autres organisations syndicales, de nombreuses entreprises, l’Urssaf, la Ministre du travail, etc. Rappelez-vous également que le gouvernement a pris des mesures pour permettre aux titres-restaurants de 2020 qui se « périmaient » en janvier 2021 d’être utilisables jusqu’au 31 août 2021 pour non seulement permettre aux Français de soutenir la restauration mais aussi de ne pas perdre cet argent (décret n°2021-104 du 2 février 2021).

Donc oui pendant que nous étions tous en télétravail durant le confinement, si nous bénéficions de titres-restaurants en période « normale », nous avons continué de les recevoir (ou alors nous aurions dû continuer de les recevoir). Ce qui semble logique !

Cependant, cette logique n’est pas celle de tout le monde … En effet le 10 mars 2021, le tribunal judiciaire de Nanterre l’a remise en cause en considérant « qu’un employeur pouvait exclure du bénéfice des titres-restaurants les salariés en télétravail à leur domicile dans la mesure où l’objectif poursuivi par l’employeur en finançant les titres-restaurants en tout ou partie, est de permettre à ses salariés de faire face au surcoût lié à la restauration hors de leur domicile pour ceux qui seraient dans l’impossibilité de prendre leur repas à domicile ».

Attention, précisons tout de suite qu’il ne s’agit que d’une décision de première instance, elle ne fait pas jurisprudence mais appelle à la vigilance. Pour nous, FO-Cadres, salariés en télétravail, dès lors que vous bénéficiez de titres-restaurants lorsque vous êtes sur site, vous devez continuer de les recevoir !

Revenons sur quelques précisions juridiques :

1/La distribution de titre-restaurant ne résulte d’aucune obligation légale. Autrement dit, la loi n’en a pas défini les conditions d’attribution. Ce sont donc des avantages concédés par l’employeur à ses salariés relevant soit de la négociation collective soit du contrat de travail soit d’un usage pour les entreprises qui ne bénéficient de restaurants collectifs en leur sein.

2/Le principe d’égalité de traitement entre les salariés : les télétravailleurs bénéficient des mêmes droits et avantages légaux et conventionnels que les salariés sur site lorsque leurs conditions de travail sont équivalentes (ANI de 2005 rappelé dans l’ANI de 2020 et article L. 1222-9 du Code du travail).

Cependant, le tribunal judiciaire a considéré que les conditions de travail des salariés en télétravail ou sur site n’étaient pas comparables puisque les télétravailleurs ne supportaient pas de surcoût lié à la restauration hors de leur domicile. De ce fait, l’employeur pouvait parfaitement supprimer la distribution des titres-restaurants lorsque les salariés exercent leurs missions chez eux.

Nous pouvons faire deux remarques, une pratique et une juridique :

1.Lorsqu’un salarié travaille dans les locaux de l’employeur, rien ne l’empêche de rentrer déjeuner chez lui s’il habite à proximité de son lieu de travail.

2.La finalité des titres restaurants mise en avant par le tribunal est une interprétation qui lui est strictement personnelle puisque l’article L. 3262-1 du Code du travail dispose simplement que le titre-restaurant est « un titre spécial de paiement remis par l’employeur aux salariés pour leur permettre d’acquitter en tout ou partie le prix du repas consommé au restaurant ou acheté auprès d’une personne ou d’un organisme ».

Enfin, la décision du tribunal ne s’applique que pour l’entreprise qui était en cause dans le litige. Mais la prudence est requise car de nouvelles entreprises pourraient être tentées d’agir dans le prolongement de la brèche ouverte par cette décision. Plusieurs choses :

1.Il s’agit d’une décision de première instance, un appel va très certainement être interjeté par le syndicat qui avait initié l’action.

  1. La Cour d’appel pourrait considérer que la décision est contraire au principe d’égalité de traitement. Dans quelles conditions l’inégalité de traitement entre salariés est permise ? Elle doit être justifiée et reposer sur des éléments objectifs (qui échappent donc à la seule volonté de l’employeur).

3.Attention aux futures argumentations développées par les entreprises pour ne plus délivrer de titres-restaurants à leurs salariés placés en situation de télétravail

Vous avez (et vous devez avoir) le droit de recevoir vos titres-restaurants même lorsque vous télétravaillez !!

L’équipe FO-Cadres.