Le rapport d’information de MM. LE MENN et MILON de 2014 concluait que :
– toutes les conséquences de la création des ARS n’ont pas été tirées : l’administration centrale a conservé la même organisation et les mêmes méthodes de travail; l’équilibre des pouvoirs n’a pas été atteint
– il est nécessaire d’appliquer pleinement le principe de subsidiarité, c’est-à-dire de faire confiance aux acteurs les plus proches du terrain.
Force est de constater que ces conclusions sont toujours d’actualité : les choses ont peu changé…et ont peut-être empiré.
Une administration centrale qui ne s’est pas rénovée
Alors que l’ambition était de décloisonner les soins de ville et l’hôpital, les constats du rapport de 2014 sont toujours d’actualité.
La territorialisation s’est construite sur des grandes régions, créant de l’éloignement avec les partenaires et au sein des équipes. Le principe de subsidiarité semble bien loin.
Les ARS relèvent directement des directions nationales au point que certains élus n’hésitent pas à saisir directement le ministre, son cabinet et/ou l’administration centrale
Les relations sociales dans les ARS
Si les élus locaux s’estiment peu écoutés, nous pouvons dire la même chose pour le personnel et ses représentants. Depuis 2010, 1600 ETP ont été supprimés, confirmant que la réduction d’effectifs s’inscrit comme le seul crédo des décideurs. Conséquences : détérioration du climat social et perte de sens comme en témoignait déjà une enquête de 2011. Celle-ci montrait que les personnels des ARS étaient plus exposés aux RPS que les autres agents publics.
Le CNC s’inscrit comme une instance d’information et de débat, et non de concertation, ce qui en fait une chambre d’enregistrement où l’UCANSS brille par son absence. La loi du 6 aout 2019 portant transformation de la fonction publique n’est pas venue arranger les choses : en ayant pour seul objectif de réduire le nombre d’IRP, elle renforce la dégradation des relations sociales.
L’ambition du mariage des cultures, « de la maison commune » chère à Mme Roselyne BACHELOT, est morte.
D’une part, alors que la coexistence de 2 statuts (agents publics et agents privés) devrait être une richesse, la fluidité des parcours professionnels (cf Rapport LIBAULT) n’existe plus. D’ailleurs, le personnel ne souhaite pas d’un statut unique.
D’autre part, les ARS ne sont plus une opportunité de carrière pour des agents qui se sentent abandonnés. Ainsi, aucun DG d’ARS n’est désormais issu de l’Assurance Maladie et les cadres et chargés de mission issus de l’Assurance Maladie se raréfient.
La culture du Service Public que possèdent tous les agents des ARS s’est retrouvée dans leur engagement dans la lutte contre la COVID-19.
Une assurance maladie « autonome »
Les relations entre les ARS et l’Assurance Maladie ont été difficiles au niveau national à la création des ARS. Aujourd’hui, la concertation ou la coordination sont « polies » mais chacun reste chez soi.
Par ailleurs, il est important de ne pas détacher des ARS le volet « santé environnement », lequel revêt un enjeu de santé publique.
Au final, à l’ère des pionniers de la réforme et de la diversité de recrutements a succédé celle des « administrateurs » chargés d’appliquer les règles (issues de circulaires) édictées au plan national. La réforme à l’origine de la création des ARS a perdu de son ambition.
Alain Gautron, Secrétaire Général du SNFOCOS