Le 18 avril 2023, le ministre de la Santé et de la Prévention a confirmé que de nouveaux postes seraient concernés dès 2024 par la réforme du 100% Santé, à savoir les prothèses capillaires et les fauteuils roulants. Autre poste évoqué : l’orthodontie.
Lors de sa mise en œuvre, le 100% santé avait pour objectif annoncé de réduire les inégalités dans l’accès aux soins et le renoncement aux soins des populations les plus fragiles. Or, il ne bénéficie que très partiellement aux personnes ne disposant pas d’une couverture complémentaire.

Le dispositif initial a été présenté par le gouvernement comme devant se faire à coût nul pour les complémentaires santé, assurant qu’il serait sans conséquence financière pour elles compte tenu d’économies attendues, notamment en optique.

Le 100% santé est une bonne réforme d’un point de vue social et sanitaire. Les organismes complémentaires ont soutenu et accompagné le dispositif. Ils participent actuellement à la prise en charge du 100% santé en optique, dentaire, audioprothèse. En 2021, les OCAM ont financé 63% de la réforme selon les chiffres de la Drees, 77% selon leurs calculs.

Les dépenses induites par le dispositif « sans reste à charge » se sont révélées inférieures aux prévisions pour l’assurance maladie obligatoire mais largement supérieures aux prévisions, pour l’assurance complémentaire.

Pour l’extension du 100% santé, le gouvernement ne nie plus le surcoût à supporter par les OCAM. Devant la presse le 27 avril dernier, la Première ministre a prétendu que leur situation financière devrait leur permettre de financer cette nouvelle charge sans créer de coûts supplémentaires pour les bénéficiaires, du fait des « marges de manœuvre » des OCAM. Affirmation en totale contradiction avec sa propre administration, la Drees, qui a écrit dans son dernier rapport que « le résultat technique en santé des organismes complémentaires est globalement quasi-nul « .

A la différence de la Sécurité sociale, les OCAM sont soumis à des règles prudentielles très strictes et doivent maintenir leurs comptes à l’équilibre. L’équilibre financier des contrats santé est donc un enjeu important et comment feindre d’ignorer que toute prise en charge supplémentaire par les complémentaires impactera, au final, les cotisations des assurés ?

L’extension décidée sans concertation passe mal auprès des acteurs de la complémentaire santé et ces derniers revendiquent d’être traités en partenaires, en acteurs à part entière du système de santé. La déléguée générale du Centre Technique des Institutions de Prévoyance (CTIP) appelle le gouvernement à travailler « dans une logique de co-construction – sur ce qui est faisable et pertinent de prévoir via cette réforme ».

Les OCAM ne peuvent être maintenus « payeurs aveugles ». Alourdir substantiellement, sans concertation, leur charge financière risque d’entraîner un déséquilibre des régimes et une hausse des cotisations des assurés bien mal venue en période d’inflation et de diminution du pouvoir d’achat.

Espérons que le 16 mai 2023, la première réunion du Comité de dialogue avec les organismes complémentaires maladie leur donnera l’occasion de faire entendre cette réalité.

Jocelyne Lavier d’Antonio, en charge de la Protection sociale collective au SNFOCOS