Fusion URSSAF courrier SJ 23062020
Sébastien Jumel
Député de Seine-Maritime
36, quai Duquesne
Dieppe 76200, BP 30071
02 35 85 14 16
A :
Monsieur Jean-Eudes TESSON, président de l’ACOSS
Monsieur Yann Gael AMGHAR ,directeur de l’ACOSS
ACOSS, 36 rue de Valmy
93108 Montreuil cedex
Le 23 juin 2020,
Objet : maintien des deux URSSAF normandes
Monsieur le Président,
Monsieur le Directeur,
J’apprends ce jour qu’une réflexion est engagée sur une possible fusion des URSSAF de Basse et Haute Normandie dans le but de créer une seule entité normande à l’initiative des présidents des CA des deux URSSAF. Une note d’opportunité défendant cette idée sera soumise au conseil d’administration de l’ACOSS, la caisse nationale du réseau des URSSAF ce vendredi 26 juin.
Permettez-moi tout d’abord de m’étonner d’une telle hypothèse de travail qui ne fait pas l’unanimité au sein des conseils d’administration des deux URSSAF normandes et qui va clairement à l’encontre de la volonté de l’ACOSS telle que déclinée dans sa dernière convention d’objectifs et de gestion, où il n’est aucunement question d’une sur-régionalisation des URSSAF qui viendrait s’ajouter à la régionalisation opérée ces dernières années.
Cette initiative est totalement isolée, elle n’est pas imitée pas les URSSAF des autres régions issues du découpage administratif de 2016.
Pourquoi donc imaginer un tel scénario en Normandie ? Peut-on sérieusement s’appuyer sur un argumentaire qui fait allusion à l’histoire, à Guillaume le Conquérant, au Débarquement… pour justifier d’un tel projet ?
Nous appréhendons aujourd’hui en Normandie très concrètement les effets délétères au quotidien de la restructuration à l’échelle de la grande région de certains services publics ou organismes chargés d’une mission de service public. J’ai en tête l’exemple de l’Agence régionale de santé qui a fondu ses deux agences en une seule, désormais basée à Caen. On a pu mesurer, depuis la mise en œuvre de cette concentration et l’éloignement du terrain qu’elle induit, et plus encore avec la crise sanitaire, son impact négatif sur les agents, leurs conditions de travail, leur motivation, leur sentiment d’utilité au travail et au bout du compte sur la qualité du service public rendu. La crise sanitaire a montré, s’il en était encore besoin, l’impérieuse nécessité qu’il y a à revenir à une échelle plus réduite, plus proche des besoins du terrain. Avec le recul des années, on appréhende mieux l’impact de la concentration régionale des services publics et de son corollaire, le risque, à termes, de fermetures de sites. Nos territoires subissent ainsi une forme de dévitalisation, un déménagement des territoires. Nos concitoyens éprouvent de plus en plus de difficultés à faire valoir leurs droits du fait de l’éloignement et de la dépersonnalisation des relations. Au bout du compte, ces concentrations finissent par fragiliser la cohésion sociale. Le retour de services publics proches, accessibles était au cœur des revendications de la crise des ronds-points. Le Défenseur des droits a pointé dans son dernier rapport une accentuation des inégalités d’accès aux services publics qu’alimente le recul de ces services.
Sur la forme je m’étonne qu’un projet de cette importance puisse cheminer en interne sans qu’à aucun moment les élus des territoires concernés ne soient associés à la réflexion, ni même informés alors que le réseau des URSSAF constitue la clé de voute de notre dispositif de protection sociale. Pour avoir été maire de Dieppe pendant 10 ans, je veux me faire le porte-voix des villes de Caen, Saint-Lô, Alençon, le Havre, Dieppe, Rouen et Evreux mises dans le vent.
La note qui habille ce projet de fusion, dont j’ai eu connaissance, est loin sur le fond de convaincre de son bien-fondé à telle enseigne que les élus des deux CSE opposés à la fusion relèvent que les arguments utilisés hier pour la départementalisation, puis la régionalisation sont aujourd’hui recyclés pour justifier cette restructuration normande.
La crise économique et sociale qui découle de la crise sanitaire dont chacun s’accorde à souligner l’ampleur va exiger la pleine mobilisation des salariés des URSSAF dont la charge de travail va s’alourdir et dont la connaissance fine du tissu économique sera plus que jamais nécessaire. On conçoit assez mal dans ce contexte, alors que le processus d’intégration des agents de l’ex- RSI est en cours, que les URSSAF de Normandie se lancent dans une fusion. Je me fais le porte-voix des 580 agents des URSSAF normandes qui savent à quel point leur mission de proximité est à préserver parce qu’elle est de nature à permettre une connaissance fine des acteurs économiques de nos territoires de vie. Ce projet inopportun et sans véritable justification doit être abandonné et la pérennité des sites garantis.
Dans l’attente, je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, Monsieur le Directeur, l’expression de mes très sincères salutations.
Copie de ce courrier à MM. le ministre des Solidarités et de la Santé, le ministre de l’Economie et des Finances, aux URSSAF de Normandie.