Dans un précédent article, nous alertions sur les absences pénalisantes occasionnées par la crise sanitaire et sa gestion par nos réseaux.
Difficile d’être exhaustif en la matière tant les situations sont multiples d’un salarié à l’autre, et d’un organisme à l’autre, malgré la soumission à un code du travail unique et à un même ensemble de textes conventionnels.
C’est d’autant plus compliqué que, malgré les initiatives du SNFOCOS, aucune négociation nationale n’est initiée.
Pourtant, les dernières annonces gouvernementales et les remontées des situations locales confirment que le SNFOCOS a raison de revendiquer et exiger des mesures exceptionnelles en faveur des salariés : en matière de congés (acquis ou en cours d’acquisition), de jours de RTT (acquis ou en cours d’acquisition), d’intéressement, de rémunération et de ses accessoires.
Dérives locales ?
L’ordonnance du 25 mars 2020 sur les congés et les jours de repos introduit des dérogations au code du travail (voir article loi d’urgence sanitaire : au détriment des salariés ?). Tout en dénonçant les conséquences, le SNFOCOS a sollicité la mise en place de « mesures barrières » pour éviter des abus.
Nous apprenons que certaines caisses ont d’ores et déjà imposé la prise de jours de RTT à leurs salariés, y compris par anticipation. Or, ces pratiques doivent être condamnées doublement :
- D’une part, la lecture du SNFOCOS interdit aux organismes de Sécurité sociale de recourir à cette ordonnance dans la mesure où aucun ne satisfait au critère premier posé par l’ordonnance : « l’intérêt de l’entreprise le justifie eu égard aux difficultés économiques liées à la propagation du covid- 19» ;
- D’autre part, nonobstant cette absence d’intérêt des organismes, l’article 2 de l’ordonnance n’autorise qu’à imposer la prise de jours de repos acquis par le salarié, de sorte qu’il est interdit à un employeur d’imposer à un salarié la prise de jours de RTT par anticipation !
Le SNFOCOS a saisi la DSS pour revendiquer et défendre la non-application de l’ordonnance du 25 mars 2020 dans les organismes de Sécurité sociale. A ce jour, nous n’avons pas de réponse à ce problème juridique « complexe » mais non moins important pour nous et l’ensemble des salariés !
Le chômage partiel, un nouveau risque ?
Vendredi 17 avril, le Gouvernement a profité de l’examen du projet de loi de finances rectificative pour renforcer le dispositif de chômage partiel. Cette information a pu passer inaperçu parmi le personnel de nos organismes car jusqu’à présent, nous étions majoritairement épargnés.
Or, en prévoyant que les salariés en arrêt dérogatoire (garde d’enfants, ALD) passeront automatiquement au chômage partiel à compter du 1er mai prochain, le Gouvernement ouvre la boite de Pandore pour nos employeurs.
En effet, si nos collègues en arrêt sont placés au chômage partiel, les Caisses nationales pourraient être tentées d’en profiter pour mettre fin aux dispenses d’activité et placer les salariés concernés en chômage partiel…ou imposer la prise de jours de repos.
Pourquoi ? Le 1er mai correspond à la date de « réinitialisation » de la période de prise de congés (qui peut être différente dans certains organismes) de sorte que certains organismes pourraient être tentés de mettre à profit plus largement l’ordonnance du 25 mars car entre le 1er et le 11 mai, date de la fin du confinement, il y a seulement 4 jours de travail à « combler »…à moins que le déconfinement ne débute plus tard !
Les employeurs n’ont pas eu recours au chômage partiel, il faut qu’ils continuent : soit en étendant le bénéfice de la dispense d’activité, soit en étendant le télétravail à ces salariés !
L’acquisition des droits des salariés, notre préoccupation
Le salarié acquiert des congés payés et des jours de repos en fonction de son temps de travail effectif. C’est un principe posé par le code du travail mais des dispositions conventionnelles peuvent être plus favorables et prévoir que certaines absences seront assimilées à du temps de travail effectif.
En temps normal, un salarié peut bénéficier de 5 semaines de congés payés légaux même s’il n’a pas été présent toute l’année notamment pour cause de maladie (Cass. Plén., 9 janvier 1987, n° 85-43471). En pratique, il suffit d’avoir travaillé de manière effective 20 jours sur un mois pour un salarié à temps complet.
C’est une des raisons pour lesquelles depuis le début de la crise, le SNFOCOS revendique qu’un accord national vienne encadrer le volet RH et porte notamment les revendications suivantes auprès de l’UCANSS et des Caisses nationales :
- Les salariés en situation de dispense d’activité ou en arrêt dérogatoire ne doivent subir aucune pénalisation de la part de l’employeur, c’est à ce dernier qu’incombe d’occuper chaque salarié en lui fournissant le matériel et/ou l’activité nécessaire. Il ne doit donc pas pénaliser les salariés en matière d’utilisation et/ou d’acquisition d’ancienneté, de congés (légaux et conventionnels), de jours de RTT, de service des primes, des titres restaurant ou de la part employeur. Rappelons-le : les salariés en dispense demeurent joignables et placés sous la subordination de l’employeur, leur contrat de travail n’est pas suspendu et ils ne sont pas responsables de l’absence de matériel, du non recours au matériel personnel, des problèmes d’accès aux réseaux et/ou du caractère télétravaillable de leur activité ;
- Dans tous les cas, la conciliation vie professionnelle / vie personnelle ne doit pas subir d’atteinte supplémentaire, notamment il ne faudra pas faire entrave à la possibilité pour les conjoints travaillant dans le même organisme et/ou dans l’institution de bénéficier d’un congé simultané (article L. 3141-14) ;
- Aucun organisme ne doit imposer la prise de RTT, de droits affectés sur le CET ou de jours de repos prévus par une convention de forfait, les organismes de Sécurité sociale ne pouvant prétendre démontrer que « l’intérêt de l’entreprise le justifie eu égard aux difficultés économiques liées à la propagation du COVID-19 » ;
- Le cas échéant, neutraliser le caractère pénalisant des absences justifiées pendant la période de confinement : garde d’enfants, personnes à risque (ALD, grossesse) ou proche d’une personne à risque, arrêt maladie.
Ni sacrifice, ni sacrifié, ni oubli, ni oublié : aucun salarié ne doit être pénalisé, toutes les situations doivent être assimilées à du temps de travail effectif au titre de la solidarité.
Le SNFOCOS défend le traitement homogène du personnel !
Chafik EL AOUGRI, Secrétaire national en charge de la Branche Maladie